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Mots clés
Le réel : ce qui est, ce qui ne peut disparaître, même si vous cessez d'y croire.
Le virtuel : ce qui est possible, ce qui est susceptible d'exister.
Avatar : double numérique de soi-même dans un univers virtuel.
Cyberdépendance ou cyberaddiction : désigne une dépendance aux écrans.
Etre nolife : personne connectée en permanence et qui n'a plus de vie sociale.
Narcissisme : admiration de soi-même.
A vous la parole !
Le virtuel est une réalité de plus en plus présente dans nos vies et le sera vraisemblablement de plus en plus : les applications numériques des nouvelles technologies révolutionnent notre relation au savoir, à l'autorité, à l’information, notre perception du temps et de l'espace. Plus de la moitié des français par exemple se consacrent quatre heures par jour aux jeux vidéo, un marché en plein essor. L’on peut s’interroger sur les raisons d’une tel engouement mais aussi sur les risques potentiels qu’encourent les usagers, les consommateurs et les citoyens.
Le débat au sein de notre classe de 4èA entre pourfendeurs du virtuel et partisans du réel a été très animé.
Extraits :
Ayoub :
Quand on joue à GTA ou à Call of Duty, on a la liberté absolue de voler, de tuer… Rien ne nous arrête, hormis les limites du jeu bien sûr. On se défoule, on se libère des frustrations, des contraintes, des interdits. C’est un exutoire. L’impossible devient possible. Les émotions que l’on ressent sont plus fortes, tout est plus exaltant que dans la vie réelle.
Steven :
Le vrai bonheur, c’est de partager et de vivre de belles relations avec ses amis, sa famille. La vraie liberté, ce n’est pas de faire tout ce que l’on veut, mais de créer des liens d’amour, d’amitié, de respect avec les êtres qui nous entourent.
Absa :
Dans le virtuel, tout est faux, illusoire, artificiel, bidon. Les amis que tu as sur Facebook ou que tu rencontres sur la toile ne sont souvent que des fantômes numériques dont on ne connaît pas l'identité réelle. Qui peut savoir qui se cache derrière un avatar ?
Ludivine :
Les réseaux sociaux ont l'avantage cependant d'offrir aux timides, aux complexés, un lieu d’écoute, d’échange, de partage dans lequel ils pourront s'exprimer librement, sans crainte et prendre confiance en eux. Le virtuel est alors une aide dans le chemin de l’affirmation de soi, une étape dans la construction de son identité.
Samantha :
Le virtuel est très souvent le refuge de personnes vulnérables, fragiles, qui ne s’assument pas et n'ont pas le courage de s'affirmer. C'est pour eux un moyen de fuir la réalité, de ne pas affronter leurs problèmes, d'oublier leurs responsabilités.
Absa :
Ils sont d'autant plus lâches qu'ils n'osent pas dévoiler qui ils sont vraiment. Ils donnent aux autres une image flatteuse, surestimée, voire fantasmée d'eux-mêmes, ils se complaisent dans le narcissisme.
Ludivine :
:
Je ne suis pas d'accord. Avec les avatars, finis les discriminations, les préjugés. On est à égalité d’image, d’apparence, de physique. Ce qui compte, ce sont les idées échangées, les paroles, l’esprit, l’humour, la personnalité. Ainsi dans La fille de mes rêves, Kamel se découvre des affinités avec sa camarade de lycée cachée sous un dream avatar des plus séduisants. Jamais peut-être il n’aurait compris l'amoureuse nature de ses sentiments pour la jeune fille au look gothique s’il ne l’avait pas rencontrée autre à travers l’écran du rêve.
Khizir :
Est-ce à dire que le monde virtuel est un monde parfait, exempt de violence, de harcèlement ? Rappelez-vous Real Dream et son essaim tueur. Dans certains contextes de simulation, le sentiment de toute puissance des utilisateurs peut avoir de graves répercussions sur le réel. Les terroristes du 11 septembre 2001 n'avaient-ils pas appris à piloter des avions sur simulateur ?
Ludivine :
Ce n'est pas le virtuel, la technologie, l'outil qui sont ici en cause, mais les objectifs que l'on veut atteindre. Certains sont justes, louables, d'autres moralement et politiquement condamnables. Les applications médicales ou pédagogiques des univers virtuels vont bouleverser notre existence, pour le meilleur. Dans certaines maternités, grâce aux nouvelles imagerie en 3D, les futurs parents peuvent voir leur bébé « en vrai » avant la naissance, des commandes cérébrales investiront bientôt les jeux vidéo avant d'offrir plus de mobilité aux personnes souffrant de handicap. Une révolution est en marche. La salle de classe en réalité virtuelle sera sans doute le quotidien de l'école de demain.
Rabab :
Mais que vont devenir les jeunes qui, perdus dans le simulacre de jeux vidéo, fantasmagorique (World of Warcraft) ou réaliste (Second Life, les Sims) confondent réel et virtuel, ne savent plus penser le temps, l'espace, n'ont plus conscience d'eux-mêmes, du monde réel qui les entoure ?
Ayoub :
Il ne faut pas tomber dans la caricature. La majorité des joueurs ne sont pas des accros compulsifs, des malades pathologiques, des cyberdépendants, des « nolife », comme l'est le personnage de Pierre Morel dans La fille de mes rêves, le toxicomane, le zombie du virtuel. Moi, par exemple, je joue car je prends plaisir à explorer l'inconnu ou à construire de nouveaux mondes, à vivre des aventures extraordinaires comme dans Prince of Persia ou Assassins creed, à changer d'apparence, à exercer des pouvoirs incroyables, à relever des défis de super-héros, à puiser dans l'éventail des possibles. Certes le virtuel ne peut satisfaire tous nos désirs, tous nos rêves. Mais c'est une façon d'augmenter le réel, de l'embellir, de l'exalter, de le faire scintiller de mille pixels.
Samantha :
Dans de nombreux pays, la cyberaddiction est désormais un problème de santé publique. Des centres spécialisés prennent en charge les malades et les gouvernements lancent des campagnes de prévention, de sensibilisation. Les risques médicaux et sociaux ne sont pas anodins : anxiété, troubles de la concentration, dépression, perte de repères, isolement, rupture familiale... Le virtuel est un mirage trompeur, une illusion infinie, une sirène numérique : son chant vous ensorcelle, vous captive et vous noie. Il ne faut donc pas céder à ses attraits ou les neutraliser à la manière d'Ulysse. Sinon attention danger !
Ludivine :
Les avatars ont du moins le privilège des dieux hindous : s'ils meurent quelquefois, ils se réincarnent aussitôt. Ils peuvent ainsi prendre des risques sans craindre les conséquences de leurs actes.
Rabab :
Dans la vraie vie, le citoyen est libre parce qu'il se donne la loi à lui-même, qu'il réfléchit, calcule, raisonne ses choix, ses décisions. Les deuxièmes chances n'y sont pas aussi nombreuses qu'au panthéon des écrans. Le monde réel est l'école de la sagesse, de la responsabilité, de la vérité, de l'irrémédiable. Le monde virtuel, celui de la folie, du paradis artificiel, de l'erreur, de l'éternel retour.
Les professeurs en conclusion :
Plutôt que d'opposer le virtuel et le réel, n'est-il pas possible de voir des ponts entre ces deux univers, ni meilleur, ni pire, de concilier les nécessités, les contraintes de notre existence avec la liberté créatrice de l'avatar, d'associer être biologique et identité numérique ? Et si la vie était un simulacre de monde imaginaire ? Et le virtuel une simulation de réalité ?